Michel de Notre-Dame est né le 14
décembre 1503 à Saint-Rémy de Provence. Son père, Jaume, était marchand de
céréales et notaire. Son grand-père paternel, Pierre de Notre-Dame, était
vraisemblablement marchand en Avignon, mais Jean de Nostredame, poète provençal
et frère du prophète, et César, fils de Nostradamus et auteur d’une histoire de
la Provence, le firent astrologue et savant, à l’égal de Jean de Saint-Rémy, le
grand-père maternel de Nostradamus. Ce dernier avait été en effet clavaire -
c’est-à-dire trésorier - de la ville de Saint-Rémy de Provence. Indéracinablement liés à cette région de la Craux, les ancêtres de Nostradamus étaient des Juifs
convertis, qui auraient exercé à la cour du Roi René.
C’est naturellement baigné de
médecine, de mathématiques et d’astronomie que Michel de Notre-Dame passa son
enfance à Saint-Rémy. Il continua ses études en Avignon, la cité cosmopolite
appartenant à la Papauté, à cinq lieues de sa ville natale. Titulaire de son
baccalauréat ès arts, les portes de la faculté de Médecine de Montpellier,
établie et renommée depuis le Moyen-Age, s’ouvrent à
lui.
Mais en 1520, la peste, apportée du Languedoc, se répand dans tout le Comtat
Venaissin. La Faculté suspend ses cours et les jeunes étudiants en médecine,
Nostradamus en tête, apprennent à combattre la terrible épidémie, contre
laquelle seules quelques mesures d’hygiène, le courage des médecins, et la
ferveur des prières pouvaient lutter.
Le 23 octobre 1529, la faculté
rouvre ses portes. Michel de Notre-Dame reprendra les cours. On retrouve son
inscription dans le "livre du procurateur" de l’époque, où son
passage est mentionné en latin: "Michel de Nostredame,
d’origine provençale, natif de Saint-Rémy, ville dépendant du diocèse
d’Avignon, est venu dans cette université de Montpellier pour étudier, par la
grâce de Dieu..."
L’étudiant préparera et passera ses "Triduanes",
dans une université que fréquentera en même temps François Rabelais.
Brillamment reçu, et nanti de son doctorat, le jeune médecin voyage à la
rencontre des plantes et des maladies. Astrologie et médecine étaient
indissociables à l’époque, et dans ces deux domaines il étonna par ses
connaissances. Selon ses biographes, il s’était déjà alors attelé à son grand
travail de prédictions astrologiques mondiales, peut-être rédigées premièrement
en latin, et qu’il hésitera à publier durant plus de trente ans. En 1533,
Nostradamus s’installe à Agen, où il se lie d’amitié avec César Scaliger,
célèbre érudit de la Renaissance, "un personnage incomparable, sinon à un
Plutarque" selon Nostradamus, et qui rivalisait avec Erasme
et Cardan. La population loue les talents des deux médecins lors de l’épidémie
de 1534. Michel de Notre-Dame se marie, mais perd sa femme et ses deux enfants
en 1538 lors d’une nouvelle peste.
Dès lors, Nostradamus parcourt la France. On le retrouve à Bordeaux, Bar le
Duc, et il aurait peut-être séjourné à l’Abbaye d’Orval, qui dépendait de
l’ordre de Citeaux. Il continue ses voyages d’études
en Italie, Venise, Gênes, Savone, Milan, Turin..., où il consigne recettes
culinaires et remèdes médicaux.
Mais la peste se déclare encore en
France, et il revient la combattre à Marseille puis à Aix, où il expérimente de
nouveaux soins et applique de très modernes, et efficaces, mesures d’hygiène.
Pour ses exceptionnels résultats, la ville lui accorde une pension perpétuelle.
Dans ses textes, il décrit encore son intervention à Lyon.
Lorsque son père meurt, Nostradamus
rejoint sa famille à Salon-de-Provence. Son frère, Bertrand, est un notable de
la ville, et Michel choisit de s’y installer. Le 11 novembre 1547, il épouse
Anne Ponsard, et fonde une nombreuse famille, tandis que la population vient le
consulter en masse. En 1553, Nostradamus finance le percement du canal qui
amène l’eau de la Durance à Salon, ouvrage de son ami Adam de Craponne. Il
publie aussi des almanachs astrologiques, fascicules de prédictions en vogue à
l’époque, qui regroupent données astronomiques, et présages astrologiques.
En 1555, Nostradamus publie
ses fameuses Centuries, ouvrage monumental composé en plus de trente ans. Elles
connaîtront le même succès que les almanachs. À tel point que Nostradamus est
invité à la cour de France par Catherine de Médicis pour tirer l’horoscope des
enfants royaux.
En 1559, lors d’un célèbre tournoi, le roi Henri II reçoit un éclat de lance
dans l’œil, et meurt, malgré les soins d’Ambroise Paré. L’épisode contribuera à
la longue renommée de Nostradamus, qui avait publié, dans ses Centuries, quatre
ans auparavant, le quatrain :
Le lion
jeune le vieux surmontera,
En champ bellique par singulier duelle,
Dans cage d’or les yeux lui crèvera,
Deux classes une puis mourir mort cruelle.
Nostradamus est à nouveau invité
par la reine, férue d’astrologie. Dans le même temps, le contexte politique se
dégrade, et s’ouvre sur les Guerres de Religion à venir. Les "cabans"
se révoltent à Salon, et conflits et peste refont leur apparition.
Afin de désamorcer la crise, la Cour de France, et le nouveau roi Charles IX,
entament un tour de France. En 1564, le jeune roi, Catherine de Médicis, et
toute leur suite, rendent visite à Nostradamus à Salon. Il est confirmé dans
ses titres de médecin et conseiller du Roi, et aurait alors prédit l’avenir
royal du jeune Henri de Navarre.
Mais en 1566 Michel de Notre-Dame
est fatigué et souffre de la goutte, et il annonce que sa mort est proche. Il
rédige son testament le 17 juin chez Maître Joseph Rouche, et meurt dans la
nuit du 2 juillet 1566, dans les circonstances exactes décrites dans un de ses
Présages. Il est enterré dans l’église des Cordeliers, où sera gravé:
"Dieu très grand. Ici les os
du très illustre Michel de Notre-Dame, estimé digne entre tous les mortels de
décrire suivant le cours des astres et de l’univers tout entier, d’une plume
presque divine, les événements de l’avenir. Il a vécu 62 ans, 6 mois, 10 jours,
et mourut à Salon en 1566."
En 1791, le tombeau fut violé par
les gardes nationaux, le cercueil brisé à coups de hache, et les ossements du
prophète dispersés. Les révolutionnaires espéraient y trouver un trésor. Ils y
découvrirent, dit-on, la date où le tombeau sera profané. L’urne qui conservait
les restes de ses ossements fut plus tard scellée dans le mur de la chapelle de
la Vierge en la collégiale Saint Laurent.
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Nostradamus devant les ruines de Glanum
dans sa chère ville de Saint-Rémy de Provence.
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L’ÉPOQUE DE NOSTRADAMUS, SES CONTEMPORAINS CÉLÈBRES:
FRANÇOIS IER:
Il régnera entre 1515 et 1547,
faisant rayonner en France la Renaissance italienne. Il est célèbre pour les
guerres qu’il mènera en Italie, depuis sa victoire de Marignan qui couronna son
avènement, à la défaite de Pavie qui le rendra prisonnier à Madrid aux mains de
Charles Quint, son rival et vainqueur à l’élection impériale. En 1540, la
réconciliation avec l’Empereur sera scellée, lors du séjour de Charles Quint à
Chambord, et Paris.
François Ier fera construire les
châteaux de la Loire, invitera en France Léonard de Vinci. Protecteur des arts
et des lettres, il créera le Collège des Lecteurs Royaux qui deviendra le
Collège de France. Cependant les premiers troubles religieux apparaissaient,
avec l’affaire des Placards.
HENRI II:
Succédant à François Ier, son père,
en 1547, il régnera jusqu’en 1559. Il s’attachera particulièrement à continuer
l’œuvre de ses prédécesseurs en Italie. Il y mènera deux nouvelles guerres,
mais devra subir des contrecoups aux frontières du nord de la France, et
notamment rappeler Guise, qui s’apprêtait à conquérir Naples, pour défendre
Saint-Quentin, et prendre Calais aux Anglais.
Nostradamus dédiera la seconde partie de ses Centuries à Henri II, lui
exposant dans une longue lettre, en introduction à son œuvre, une grande partie
de sa vision du futur. Le roi invitera le médecin et astrologue provençal à
Paris et Saint-Germain.
Roi sportif et guerrier, Henri II attachera à la Cour une stricte étiquette.
Sous son règne on célébrera les grands événements par des entrées triomphales,
illustrées de légendes antiques. Tout cela sera résumé à l’occasion des
célébrations couronnant le traité de Cateau-Cambrésis, qui mettait fin aux
guerres de son règne, et scellait les mariages politiques de Marguerite de
Valois et d’Elisabeth de France.
Lors d’un tournoi organisé à cette occasion, le jeune comte Gabriel de
Montgomery affrontera le roi. Au second assaut, les lances se brisent, et le
tronçon de celle de Montgomery soulève la visière d’Henri II et pénètre dans
l’œil. Malgré l’intervention du chirurgien célèbre Ambroise Paré, le roi mourra
après des jours d’agonie. Ces événements avaient été annoncés, quatre ans
auparavant, dans un des plus célèbres quatrains des Centuries de Nostradamus.
RABELAIS:
Le célèbre écrivain et humaniste de la Renaissance est né près de Chinon vers
1494. Bénédictin, il sera aussi médecin, et étudiera à la Faculté de Montpellier
en même temps que Nostradamus. Leur amitié fait surtout partie de la légende,
que l’on se plaira à orner de détails toujours plus nombreux avec le temps.
Écrivain vivant, épicurien, il mêle
facéties joyeuses et philosophie de la nature. Il publie son
"Pantagruel" en 1532 et son "Gargantua" en 1534. Témoin des
modes de son temps, il écrit aussi des "Almanachs Pantagruel",
pastiches irrésistibles des ouvrages astrologiques à la mode, qui recevaient un
succès populaire extraordinaire. Il mourra en 1553.
COLIGNY:
Gaspard de Coligny (1519-1572) est l’un des héros guerriers de l’époque. Il
sera le héros de la bataille de Cérisoles, en 1544,
et nommé Amiral de France en 1552. Il sera aussi le défenseur de Saint-Quentin
en 1557.
Comme chef huguenot, il sera mêlé
aux premières Guerres de Religion. Sans être nommé, il est logiquement au
centre de nombreux quatrains et Présages, notamment les présages 125 à 135, qui
évoquent son action politique et sa tentative d’installation des protestants
français en Floride . Il sera assassiné lors de la Saint-Barthélémy,
en 1572.
LES GUISE:
Les ducs de Guise ont une
importance primordiale dans l’Histoire de l’époque. Descendant par les femmes
de la maison d’Anjou-Provence, c’est-à-dire du Roi René, ils intéressent
particulièrement Nostradamus. Ses ancêtres auraient servi à la Cour du Roi
René, qui rayonnait sur toute la Provence. Les ducs de Guise sont surtout les
grands héros guerriers de cette époque, et logiquement au centre de nombreux
quatrains des Centuries.
François (1519-1563) sera le
défenseur de Metz en 1552, le conquérant de Calais en 1558. Il sera surnommé,
pour ses faits d’armes, "le conservateur de la patrie". Il sera
abattu au cours du siège d’Orléans par un huguenot, Jean Poltrot de Méré.
Plus tard viendra le fameux Henri (1550-1588), troisième duc de Guise, et
surnommé "le balafré". Au centre des Guerres de Religion, et champion
du catholicisme, rival de Coligny, il deviendra la chef de la Ligue, et sera
assassiné dans le château de Blois sur ordre d’Henri III.
Viendront encore Louis (1556-88), cardinal de Guise, assassiné deux jours après
son frère, et Charles (1554-1611), duc de Mayenne qui se soumettra à Henri IV.
MICHEL DE L’HOSPITAL:
Michel de l’Hospital (1507-1573)
est l’un des parfaits contemporains de Nostradamus. Par ailleurs fils de
médecin, il devient docteur en droit, chancelier du Berry en 1547, et
chancelier de France en 1560. Auprès de Catherine de Médicis, il tentera
d’éviter les guerres civiles et sera à l’origine du colloque de Poissy. Mais il
sera écarté de la Cour en 1568, et les Guerres de Religion battront leur plein.
CATHERINE DE MÉDICIS:
Née en 1519 de la famille qui
régnait sur Florence, et proche des souverains pontifes, elle épousera le
prince Henri, fils de François Ier. Il succédera à son père en 1547, et régnera
sous le nom d’Henri II. Catherine de Médicis accédera alors au trône. Stérile
jusqu’en 1544, elle donnera naissance à de nombreux enfants. Fait exceptionnel,
trois deviendront rois: sous les noms de François II, Charles IX, et Henri III.
Elle sera trois fois régente, et occupera une place politique exceptionnelle de
longévité et d’influence, régnant presque à la place de ses jeunes enfants.
Parmi ceux-ci, on comptera aussi Marguerite, "la reine Margot", qui
sera forcée d’épouser, par calcul politique, le futur Henri IV.
Comme petite-fille de Laurent le
Magnifique, Catherine de Médicis hérita des Florentins le goût pour les
intrigues de Cour. On la rend responsable du massacre de la Saint-Barthélémy,
où Coligny sera exécuté. Mais elle aura tout autant essayé de se débarrasser
des Guise, à l’influence trop prononcée.
Catherine de Médicis est célèbre
aussi pour son goût des sciences occultes. Elle s’était entourée d’une nuée
d’astrologues et de devins sans qui, dit-on, elle ne prenait pas la moindre
décision. Parmi ceux-là Ruggieri, et Ogier Ferrier.
Mais elle consulta aussi Luc Gauric, et, bien sûr,
Nostradamus, qu’elle fera médecin et conseiller du roi en 1564, et à qui elle
rendra visite avec la Cour, à Salon.
DU BELLAY:
Joachim du Bellay est né près de
Liré en 1522 et mourra en 1560. Ami et collaborateur de Ronsard, il rédigea le
manifeste de la Pléiade. On lui doit la "Défense et Illustration de la
Langue Française" en 1549, mais aussi une œuvre poétique célèbre illustrée
par "Les Antiquités de Rome" et "Les Regrets", en 1558.
RONSARD:
Pierre de Ronsard (1524-1585) est le célèbre poète français à l’origine de la
Pléiade, avec Du Bellay.
Il écrira des "Odes" en 1550, inspirées de Pindare, les
"Amours" (1552-1555), et les célèbres "Hymnes" (1555-1556),
dans les années où Nostradamus publiait ses Centuries. On doit à Ronsard aussi
ses "Discours des misères de ce temps" (1562-1563) contre la Réforme
alors que Nostradamus entreprenait une "Histoire des guerres de Religion
en Provence" qui ne sera pas publiée.
Ronsard deviendra poète officiel du roi Charles IX en 1560, quatre ans avant
que Nostradamus ne devienne médecin et conseiller du roi. A la mort de
l’astrologue, le poète célébrera Nostradamus dans un poème écrit pour l’occasion.
Lui-même disparaîtra en 1585, sans avoir pu achever son épopée, la
"Franciade", commencée en 1572.
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